Bonjour à tous. Et non ce blog n'est pas mort (pas encore !). Etant en congé maternité, j'ai à nouveau un peu de temps pour écrire... Du coup, j'ai rédigé une page sur le thème "mon chat boit beaucoup", mais comme elle n'apparaît pas sur la page principale, et que sur une "page" on ne peut pas laisser de commentaires ou de questions, je l'ai ré-éditée en article.
Bonne lecture !
Mon chat boit beaucoup : que dois-je faire ?
Parmis les questions que beaucoup de propriétaires de chat se posent, il y a a celle ci : "mon chat boit beaucoup, est-ce normal?".
La réponse est non. C'est ce qu'on apelle la PUPD : polyuro-polydispsie (uriner plus et boire plus).
Cette constatation doit vous inciter à consulter votre vétérinaire, car très souvent, c'est le 1er symptôme d'une maladie potentiellement sérieuse.
1. Comment puis-je réellement savoir si mon chat boit de façon excessive ?
En moyenne, on estime qu'un chat qui reçoit une alimentation sèche (croquettes) peut boire jusqu'à 60mL/kg par jour, soit 300mL pour un chat de 5kg. S'il mange de la pâté, celle ci apporte beaucoup d'eau au chat, donc en général il boit moins. Le plus simple est de mettre 500mL par exemple à une certaine heure le matin, et de mesurer ce qui reste dans la gamelle le lendemain matin à la même heure. Cela permet d'estimer facilement la quantité d'eau bue sur 24h. En cas de doute, une mesure de la densité urinaire permettra de trancher (pour cela il suffit de récupérer un peu d'urines, votre vétérinaire pourra vous fournir des kits de recueil d'urine, à mettre dans le bac à litière à la place du substrat habituel).
En réalité, c'est surtout un changement dans la quantité d'eau bue chaque jour qui doit vous alerter. Par exemple, un chat qui buvait très peu, et qui se met à passer beaucoup plus de temps devant sa gamelle d'eau, ce n'est pas normal. Ou alors vous constatez que vous devez remplir sa gamelle plus souvent qu'avant. Autre indice si c'est un chat qui ne sort pas : sa litière est plus vite "pleine d'urine" qu'avant et vous devez la nettoyer beaucoup plus souvent.
D'ailleurs, j'estime personnellement que même si la quantité ne dépasse pas 60mL/kg/jr, si le chat se met à boire plus, il faut quand même vérifier que tout va bien. Parfois, le chat boit juste un peu plus, mais c'est parce qu'il a mal au ventre, ou que la maladie qui provoque ce symptôme n'est pas encore à un stade très avancé : même si la quantité d'eau bue est raisonnable et que ça vous rassure, n'attendez pas. Plus une maladie est détectée précocément, plus le chat aura de chance de vivre mieux et plus longtemps.
2. Quels sont les causes "normales" d'une augmentation de la prise de boisson ?
2.1. le passage d'une alimentation humide (pâté) à une alimentation mixte, ou sèche (croquettes) :
Forcément, l'aliment apporte moins d'eau donc le chat compense (plus ou moins) en buvant plus. ATTENTION : il ne faut jamais passer brutalement d'une alimentation humide à une alimentation sèche, les chats ne sont pas de grands buveurs et la plupart du temps, ils ne compensent pas suffisament ce "manque à gagner". Il faut que ce soit fait progressivement, et que vous vous assuriez qu'il boive suffisament, sinon il risque fortement de faire (entre autres) des cystites voire des calculs urinaires car ses urines seront trop concentrées.
2.2. une augmentation de la quantité de sel dans son aliment :
Si vous venez de changer de marque de croquettes et que c'est à ce moment là que votre chat s'est mis à boire plus, pensez à vérifier la teneur en sel et à la comparer à celle de l'ancien aliment. Le meilleur moyen pour voir si c'est l'aliment qui est responsable, c'est de repasser à l'ancien aliment et de voir si les choses redeviennent comme avant.
2.3. une augmentation des "pertes en eau" :
- en cas de diarrhée et/ou vomissements, il est normal que le chat compense ces pertes en buvant plus. Des vomissements très fréquents et/ou chroniques, et une diarrhée (ou des selles molles) qui durent depuis plus de 2-3 jours, doivent vous inciter à consulter votre vétérinaire.
- quand il fait très chaud, notament si l'air est très sec. Car même si le chat ne transpire pas, il peut perdre un peu plus d'eau en haletant, mais souvent c'est très discret et l'on ne s'en apperçoit pas.
2.4. Une fièvre prolongée peut aussi provoquer une augmentation de la soif.
3. Quelles sont les principales maladies qui peuvent provoquer une PUPD chez le chat ?
3.1 L'insuffisance rénale.
Elle est fréquente chez les chats âgés, mais peut arriver à tout âge. La PUPD est le 1er symptôme de l'insuffisance rénale : les reins n'arrivent plus à concentrer les urines, la perte d'eau importante dans les urines oblige alors le chat à compenser en buvant plus. Quand l'insuffisance rénale est plus avancée, et que le taux d'urée dans le sang dépasse les valeurs normales, d'autres symptômes peuvent être constatés, notament : amaigrissement, perte d'appétit ou appétit plus capricieux, fatigue, vomissements plus ou moins fréquents, constipation, poil terne, mauvaise haleine, ... N'attendez pas que ces symptômes apparaissent. Pour ralentir la progression de la maladie rénale, il est essentiel d'agir précocément.
3.2. Le diabète sucré :
Il peut arriver à tout âge. Les chats obèses sont prédisposés. En cas de diabète, la présence de sucre dans les urines provoque un "appel d'eau", et le volume d'urine excrété est alors très important. Le chat compense en buvant plus, et souvent la quantité d'eau bue est vraiment très importante (plus que lors d'insuffisance rénale). Il est important de dépister tôt un diabète, car l'hyperglycémie peut avoir des conséquences graves, mais surtout, il faut savoir que le diabète est souvent réversible chez le chat. Et plus tôt il est pris en charge, plus les chances de guérison sont importantes. Les autres symptômes du diabète sont un amaigrissement rapide, malgré un appétit vorace, une plantigradie (le chat est normalement digitigrade, cela veut dire qu'il marche sur les doigts, en cas de neuropathie secondaire au diabète, il pose parfois tout le pied au sol notament sur les postérieurs), une cataracte d'apparition brutale, etc...
3.3. L'hyperthyroïdie :
C'est une affection que l'on rencontre très fréquement chez les chats de plus de 8 ans. Très souvent, elle est due à une hypersécrétion d'hormones thyroidiennes par une tumeur touchant une des glandes thyroidiennes. C'est glandes sont situées le long de la trachée, et normalement de taille trop petite pour être palpables. Chez les chats hyperthyroïdiens, on sent souvent un nodule à proximité de la trachée (ce n'est pas évident pour vous de le sentir, donc ne cherchez pas, mais votre véto lui a l'habitude). Les chats hyperthyroidiens présentent souvent un amaigrissement important malgré un appétit plutôt bon voire vorace (cela dit, parfois au contraire l'appétit est fluctuant voire diminué, mais ce n'est pas la majorité des cas), des vomissements fréquents, parfois des selles molles voire des diarrhées chroniques, de la nervosité, pouvant aller jusqu'à de l'agressivité, et des vocalises nocturnes (miaulements forts, sans raison apparente).
ATTENTION : la liste des symptômes n'est pas exhaustive, et tous les chats ne vont pas forcément développer les mêmes symptômes même s'ils souffrent de la même maladie.
Parfois, chez les chats âgés, le chat peut être touché par plusieurs affections simultanément.
De même, les symptômes pris isolément, ne sont pas spécifiques des maladies citées ci-dessus. Les vocalises par exemple, peuvent être rencontrées en cas d'hypertension, d'anxiété, ou tout simplement à cause de la sénéscence (vieillissement du cerveau). Ces listes de symptômes sont simplement donnés à tître d'information et ne peuvent à eux seuls vous permettre de faire un diagnostic. Seul votre vétérinaire, en examinant votre animal et en faisant les analyses nécessaires, pourra poser un diagnostic.
3.4. Autres maladies pouvant provoquer une PUPD (liste non exhaustive) :
- le diabète insipide : peu fréquent. Il est lié à un déficit en hormone anti-diurétique ou à une anomalie des récépteurs rénaux à cette hormone (ce qui rend les reins insensibles à cette hormone et les empêche (grosso modo) de "retenir l'eau dans l'organisme"). Cela entraîne une production d'urines très diluées, en quantité énorme et le chat doit boire énormément pour ne pas se déshydrater. L'émission d'urine ne diminue pas même si on prive le chat d'eau (attention ne faites pas le test à la maison, cela peut le tuer!). En général tant que le chat peut boire, il va bien.
- une affection hépatique : cholangite, cholangiohépatite, tumeur/cancer du foie...
- une pancréatite chronique
- une lésion de l'estomac (gastrite chronique, tumeur, ulcère)
- une hypercalcémie : lorsque le taux de calcium dans le sang augmente, cela provoque une augmentation de la soif. L'hypercalcémie peut avoir plusieurs origines, la plupart du temps (car je ne vais pas citer les causes les moins fréquentes), elle est causée par une hypersécrétion de parathormone soit par :
--> les glandes parathyroidiennes (petites glandes situées près des glandes thyroidiennes), qui peuvent en cas de tumeur (bénigne ou maligne) sécréter cette hormone en excès.
--> un cancer : des cellules cancéreuses peuvent aussi sécréter de la parathormone, par exemple les lymphomes, les adénocarcinomes (chez le chat par exemple, les tumeurs mammaires ou leur métastases.
4. Comment le vétérinaire va-t-il procéder pour identifier la cause de la PUPD ?
4.1 L'anamnèse et l'examen clinique
- En premier lieu, le vétérinaire va vous demander de lui énoncer tous les symptômes que présente votre chat (essayez de ne rien oublier !). Il va vous poser tout un tas de questions pour avoir des précision sur ce que vous lui avez dit, ou pour en savoir plus sur certains points essentiels que vous n'auriez peut être pas abordé : (entre autres) a-t-il perdu du poids, comment est son appétit, comment sont ses selles, présente-t-il des vomissements, et si oui à quelle fréquence. Etc...
- Ensuite, l'âge du chat, sa morphologie, et son historique médical (normalement le vétérinaire note tout, y compris l'évolution de son poids à chaque visite) vont également lui permettre de privilégier certaines hypothèses par rapport à d'autres.
- Enfin, le vétérinaire va examiner votre chat : examen exhaustif de l'ensemble du corps (y compris la palpation des glandes thyroides), pesée, auscultation, etc...
4.2 Les examens complémentaires :
Même si les informations précédentes permettent souvent d'avoir une petite idée de l'origine du problème, il faut faire des examens complémentaires pour préciser le diagnostic. D'ailleurs parfois, l'anamnèse et l'examen clinique ne révèlent rien d'autre que la PUPD, et alors là, c'est le flou total, les examens complémentaires en devient encore plus cruciaux.
- Si le vétérinaire a un doute sur le fait que votre chat présente une réelle PUPD, il va effectuer une mesure de la densité urinaire. les urines peuvent être obtenues en pressant la vessie si le chat n'a pas uriné peu de temps avant et surtout s'il est cool et très détendu (ce qui est rare). Une autre possibilité est de les prélever par cystocenthèse : on aspire un peu d'urine avec une seringue, à travers la paroi abdominale. C'est quasiment indolore mais pas forcément agréable, donc là aussi il faut que le chat soit cool, et que sa vessie ne soit pas vide. Le plus simple en général, est d'utiliser un kit de recueil d'urine, et vous récupérez vous même les urines dans la litière une fois que le chat a fait naturellement. C'est le moins invasif et le plus sympa pour le chat, mais du coup, on n'a pas la réponse tout de suite !
- Une prise de sang, qui permettra de réaliser :
- une analyse biochimique (le chat doit être à jeun pour que les résultats soient plus fiables) : au minimum urée et créatinine (pour vérifier le fonctionnement des reins), une glycémie (augmentée en cas de diabète), certains paramètres hépatiques (au minimum PAL et ALAT) pour s'assurer que le foie va bien (même si des valeurs normales n'excluent pas un problème hépatique, mais je ne vais pas entrer dans le détail).
Chez le chat, la glycémie peut augmenter de façon importante en cas de stress (et la prise de sang, en général, ça les stresse), donc si la valeur de la glycémie est douteuse (grosso modo entre 1.5 et 3g/L) il peut demander un dosage des fructosamines en laboratoire. Ce dosage permet d'avoir une idée de la glycémie sur les 15 jours précédents, et n'est donc pas influencé par le stress.
- un dosage de T4 (hormone thyroidienne) à la clinique s'il son analyseur le lui permet, ou dans un laboratoire vétérinaire (les labos pour humains ne sont pas fiables pour le dosage de T4 féline)
- si une pancréatite est suspectée, il peut faire un test rapide à la clinique (s'il a le matériel chez lui), ou envoyer le sang dans un laboratoire d'analyse vétérinaire, pour mesurer la SpecFpL (Specific Feline pancreatic Lipase)
- Si la prise de sang ne donne rien, et si le chat présente en plus de la PUPD, des symptômes tels que : amaigrissement et/ou troubles digestifs chroniques, le vétérinaire va prescrire une échographie abdominale. Celle ci va permettre d'évaluer (entre autres) le foie, le pancréas, l'état des reins, et l'aspect du tube digestif.
- En cas de suspicion de diabète insipide (chat jeune, sans autres symptômes que la PUPD, avec une densité urinaire extrêmement basse), le vétérinaire vous proposera un test de restriction hydrique (qui va nécessiter de garder le chat à la clinique toute une journée) ou un test à la desmopressine (la fameuse hormone anti diurétique) pour voir si la PUPD cesse avec des instillation intra oculaires de desmopressine.
Tous ces examens peuvent être relativement coûteux, mais sont nécessaires pour établir un diagnostic. Et parce que l'on sait que cela coûte cher, on procède souvent par étape : d'abord la prise de sang, puis si la prise de sang ne donne rien, on fait une échographie abdominale, etc ...
N'hésitez pas à demander un devis avant de commencer tout ça.
Ensuite c'est à vous de voir : si vous trouvez que le coût est excessif, vous êtes en droit de refuser de faire tous ces examens, mais dans ce cas, le diagnostic ne pourra pas être fait (on est pas devins !)... Le chat ne sera pas traité (si toutefois un traitement existe, cela dépend de la cause identifiée), et quand il commencera à aller mal il sera probablement trop tard... Alors à vous de voir si vous voulez ou non prendre ce risque...
Voilà, vous savez tout ou presque ! N'hésitez pas à me poser des questions (dans les commentaires) si je n'ai pas été assez claire sur certains points ou si vous voulez d'avantage de précisions. Ne me demandez pas pourquoi votre chat à vous boit beaucoup, en me listant tous ses symtômes, car comme vous l'avez compris, sans l'examiner et sans faire d'examens complémentaires, je ne pourrais pas vous répondre. En cas de doute n'hésitez pas à demander directement à votre vétérinaire !
Donc voilà : pour résumer, si votre chat se met à boire plus, même s'il a l'air d'aller très bien, prenez rendez-vous avec votre vétérinaire ! Lui seul pourra vous dire s'il y a lieu de s'inquiéter ou non, et s'il est nécessaire de faire des examens complémentaires.