Il était une fois une petite rate grise, aux oreilles un peu larges (à la ), qui se retrouve avec 13 de ses congénères, à la SPA.
Stef, jeune vétote, qui a déjà deux ratouilles, tombe sur la dernière de la bande, la seule qui n'a pas été adoptée à cause d'une plaie sous la mâchoire qui ne cicatrise pas.
Une fistule...
La plaie semble propre, sèche, elle reçoit du baytril en injection une fois par jour depuis 3 semaines, la pauvre, et des soins locaux quotidiens, et elle se laisse faire, mais semble complètement tétanisée quand on la prend dans nos mains. Le contact humain-rat se limite aux soins, alors forcément...
Je décide de tenter une petite chir pour cureter la plaie (comme un abcès de chat-chien), nettoyer en profondeur, et suturer tout ça et... de la prendre chez moi pour assurer les soins posts op quelques jours...
Problème: au bout de quelques jours, la plaie se nécrose, et du pus en ressort, et on revient au problème initial: cette fichue fistule.
Elle est toute mimi, moi et Tom on craque: on n'a pas le coeur de la remettre à la SPA. Alors on décide d'adopter la ratouille, parce que seule dans une cage à la SPA, sans contact avec les humains autres que les soins, c'est pas une vie de rats (je sais bien, ils font ce qu'ils peuvent avec tout le boulot qu'ils ont là bas). Et puis ici elle aura la chance d'avoir deux copines: Globule la rate neurologiquement à l'ouest, et Bidouille l'aventurière.
Je décide de changer de tactique pour la soigner. Je me dit que 3 semaines de Baytril n'ayant servit à rien, autant essayer un autre antibio: j'essaie sans conviction de Bactrim, mais la miss, peu confiante dans l'espèce humaine, se révèle un peu non coopérative pour l'administration du sirop ainsi que pour les soins: madame crie, et se débat, et ça me fend le coeur.
A cours d'idée je l'emmène chez un spécialiste des NACs. Il fait une radio sous anesthésie et diagnostique un abcès dentaire: "il faut retirer l'incisive" me dit-il... "Et c'est pas facile sur un rat, remarquez forcément, sinon vous ne seriez pas venue me voir" .. visiblement c'est une première pour lui aussi sur un rat.
Pour la modique somme de 200 euros (sig) il me retire l'incisive et me prescrit de poursuivre le bactrim . On en bave pour lui faire avaler les antibio, d'autant qu'elle a super mal et que pendant 2 à 3 jours elle n'arrive à s'alimenter qu'avec des aliments mous.
Malgré ces 200 euros, rebelote quelques jours après: un abcès se reforme, la plaie s'ouvre, et l'odeur nauséabonde est de retour. Fichues bactéries anaérobies, qui en profitent pour proliférer dès qu'on ferme la plaie.
Remarque non chronologique: En plus de cela, la dent repoussera lentement jusqu'à refaire surface plus d'un mois plus tard: bordel, 200 euros pour retirer une dent, qui revient finalement (il n'a pas du bien détruire la base de la racine dentaire, qui génère chaque semaine deux millimètres de nouvelle dent... Dégoûtée, je décide d'aller voir un autre spécialiste (pas tout de suite, parce que un peu déçu de cet échec malgré le statut de spécialiste et au vu du prix que cela m'a coûtée ( et le temps de refaire un peu le plein au niveau finances).
Le nouveau spécialiste a l'air de savoir de quoi il parle, et me précise ceci:
- il ne retire jamais de dents chez les rats car la dent d'en face pousse et c'est galère ( faut la couper tous les 7 à 15 jours), et comme la mâchoire est plus petite et fragile que chez les lapins, couper comme ça à la pince, c'est non seulement délicat (mais, Grisette, pousse ta langue!!! ce sont les dents qu'on veut couper) mais c'est aussi risquer de lui casser la mâchoire (bbbrrr rien que d'y penser, ça me fait froid dans le dos)
- la radio (super radio numérique, sur laquelle on peut zoomer, beaucoup plus précise que la précédente) montre des plages de lyse et de prolifération osseuse de la mandibule: c'est une ostéomyélite. En gros, pour les non initiés, la mandibule est toute rongée par une infection, donc fragilisée, déformée... etc. Il me dit que chez les rats, cela vient la plupart du temps d'un abcès de la joue (suite à une blessure par ex) qui, non soigné, se propage aux tissus sous-jacent, à savoir l'os. Il dit que ce sont des bactéries anaérobies et que le bactrim là dessus ça ne fait rien.
- il préfère ne pas réintervenir là dessus car l'os est très fragilisé et risque de casser. Que lui ne retire jamais oh grand jamais de dents chez les rats (argh), que ça pose trop de problèmes ensuite,n et que de toute façon, là n'est pas l'origine du problème.
-Il dit aussi que le pronostic est très sombre à ce stade... :'-( Il me prescrit un antibiotique actif contre les germes anaérobies: du métronidazole, du métacam pour la douleur et l'inflammation), et des injections de pénicilline tous les 3 jours (qu'on arrivera pas à faire malheureusement), et des soins quotidiens.
On a du mal à la soigner, mais on arrive à lui faire prendre les antibio. Pour les soins locaux c'est un peu la guerre. Au bout de 20 jours d'antibio, malheureusement, ce n'est pas franchement différent....
J'aurais dû retourner le voir aussitôt mais j'étais un peu déçue de tous ces efforts pour rien, et puis notre emploi du temps un peu monstrueux à l'époque rend compliqué la prise d'un rendez vous.
Du coup je l'anesthésie moi même, je refais un nettoyage en profondeur, puis on s'astreint à tenter la clindamycine (aucun bouquin sur les nacs ne nous dit si c'est dangereux ou non, mais c'est un antibiotique actif contre les bactéries anaérobies, alors on tente le tout pour le tout). Et on s'oblige, malgré sa résistance, à bien nettoyer tous les jours ensuite. Ça semble allez mieux, on est content, c'est moins rouge moins gonflé...
Mais les dents sont maintenant tellement plus en face, que c'est encore galère pour les lui couper. Elle a tellement peur quand on la tient pour lui couper les dents, qu'une fois elle a uriné et déféqué de stress. Pourtant sur le moment ça ne lui fait pas si mal, mais elle appréhende.
On avait l'impression d'avoir réussi, et avant hier, rebelote: un abcès s'est reformé, pas là où on nettoyait, mais plus en avant de la mâchoire, là ou les vilaines bactéries étaient protégées de l'air par l'absence de la fistule. Une énorme quantité d'un pus crémeux, pâteux se met à sortir par une alvéole dentaire lors d'un soin (cette fameuse dent qui a repoussé et ressemble à un embryon de dent sans émail... Elle semble soulagée par l'évacuation d'une partie de ce pus. me voilà obligée de la réanesthésier pour évacuer le reste. Comme à chaque anesthésie, le réveil est dur-dur, et elle a mal. Moins cette fois car j'ai osé l'injection de tolfédine (anti inflammatoire et antalgique) même si la dose pour un animal de cette taille est minime... et que sans perf pendant l'anesthésie, c'est pas le top les ains, mais allez, la priorité c'est son confort.
Je suis déchoupinée. Ça n'en finira donc jamais? j'en ai marre d'avoir l'impression de la torturer, même si au final c'est pour son bien. Grisette, c'est la plus timide, la plus candide de mes 3 rates. La plus jeune, la plus frêle. J'ai l'impression de la trahir quand je l'appelle pour au final non pas lui donner un bout de biscuit mais lui faire ses soins et lui faire avaler des antibiotiques.
Ma griz-griz... que devons nous faire... L'euthanasie? oui mais tu manges encore, tu cours encore, tu joues encore... Même si ça devient de plus en plus dur pour maintenir ton infection à un niveau minimal, et pour te couper les dents quand elles deviennent trop longues et gênantes...
Hier avec Tom, on s'est dit que c'était la dernière anesthésie.. qu'il ne fallait pas s'acharner plus longtemps. QUe même si tu mangeais, tu devais avoir mal. Tu as dû t'habituer, à la douleur chronique, ne plus sentir, à force d'avoir mal... Une protection du corps, face aux douleurs intenses et prolongées. Au bout d'un moment, le cerveau ne reçoit plus les signaux de douleur: il les ignore.
Aujourd'hui je me suis dit que je n'aurai pas la force de l'euthanasier, sans avoir été une dernière fois voir le second spécialiste, le meilleur de France, pour qu'il me dise si il restait ou non quelque chose à tenter.Aujourd'hui elle est un peu groguie, mais contrairement aux anesthésies précédente elle a déjà retrouvé l'appétit (vive la toflédine) et a mangé un biscuit trempé dans du lait gentiment apporté par Tom ce matin.
Ma Griz Griz, j'aimerais tellement t'enlever ce mal qui te ronge. Mais pas au point de t'imposer trop de souffrances, je te le promet, on fera au mieux pour toi. Et tant pis si le mieux c'est le paradis des rats, on ne te gardera pas par égoïsme, justement parce que l'on t'aime.